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Le blog de Véronique Mahé

“Paul Vaillant-Couturier disait : « Le communisme est la jeunesse du monde. » J’ai envie de dire qu’il nous revient à nous, à nous tous de faire en sorte que la jeunesse soit le communisme d

14 Février 2013, 21:09pm

Publié par veronique mahe

Cher(e)s camarades,

Je m’appelle Nordine Idir, j’ai 27 ans et pas encore de page Wikipedia. Les grands médias n’ont pas fait de moi leur grande coqueluche. Quand ils m’adressent la parole, c’est tout juste pour s’étonner qu’avec un nom pareil je sois secrétaire général du premier mouvement politique de jeunesse.

J’ai un master de science politique de l’université Paris-8 Saint-Denis, BAC + 5 quand même! Alors que mes parents n’avaient pas le bac. Ils se sont serrés la ceinture pour me payer les études, j’ai dû prendre des jobs étudiants aussi, ça n’a pas été facile tous les jours mais j’y suis arrivé.

Je suis un peu la gloire de la famille.

Alors face à ceux qui ont fait leurs classes dans les meilleurs lycées privés, c’est sûr: je ne fais pas le poids. Contrairement au Prince Jean Sarkozy, il n’y a pas eu de conférence de presse pour annoncer au monde entier la réussite de mes examens. Et contrairement à lui, si mon père se retrouve au chômage, aucune caméra ne sera là pour faire pleurer dans les chaumières.

Marion Maréchal-Le Pen, élue députée et porte-parole autoproclamée de la jeunesse a droit à tous les tapis rouges que l’on puisse rêver. Elle, qui part en guerre contre les « avortements de confort » et les soi-disant « charges » qui pèsent sur les entreprises, comme elle l’a fait sur les contrats de génération. Est-elle autre chose qu’une marionnette au visage bien lisse, qui sert la soupe nauséabonde pour le compte de sa classe ?

Nous, nous sommes les invisibles de ce pays. Nous sommes une génération condamnée à se taire. C'est bien oublier les politiques de précarisation dont nous sommes constamment les premières victimes. Dès qu'un nouveau gouvernement est intronisé, ce sont les jeunes qui subissent le prix fort. C'est loin d'être un hasard. Il s'agit bien d'attaquer les fondements de la société.

Marie-George Buffet l'a si bien résumé : nous sommes dans les sous-sols du salariat. Nous sommes la main-d’œuvre bon marché. Nous sommes les invisibles des temps partiels subis. Nous sommes les intérimaires en missions pour les actionnaires. Nous sommes les employés à durée limitée. Nous sommes aux côtés de ces millions de femmes et de travailleurs sans-papiers : une main-d’œuvre humiliée, seulement bonne à se faire exploiter.

Nous sommes la génération de la peur

Nous vivons dans la peur de notre avenir car il est impossible de se l'écrire, de se projeter, de construire sa vie.

Nous inspirons la peur car nous ne respecterions pas les règles, nous ne serions pas assez disciplinés. Nous serions une classe dangereuse : égoïste, paresseuse, et intolérante. On nous dit désintéressés de la chose publique. Pourtant, ma génération a été de tous les combats pour conquérir ou arracher ses droits. Elle est celle qui a fait trembler le pouvoir contre le CPE, contre la privatisation des universités, contre la casse des retraites, qui a fait perdre Nicolas Sarkozy. Élément déclencheur ou force propulsive, nous avons un rôle déterminant dans les mobilisations populaires.

Pourtant, malgré ces cris de colère, persiste ce sentiment de ne pas être écouté,. Comment oublier que les jeunes s'abstiennent majoritairement aux élections, exception faite du scrutin présidentiel ? Combien de députés de moins de 30 ans dans l’hémicycle parlementaire ? Quelle place des jeunes dans leurs lieux de vie, eux qui sont bien souvent réduits à un rôle consultatif ? Quelle réponse a-t-on apporter à ces émeutes sporadiques et régulières dans de nombreux quartiers ?

Les jeunes sont clairement dans les sous-sols de la politique, ni plus ni moins. Notre parole est confisquée. Condamnée à être déléguée. On nous cantonne à être spectateur, mais jamais acteur. Jusqu'à quand cette parole sera-t-elle négligée, méprisée ?

Quoi de plus normal alors, que les jeunes ne fassent plus confiance aux organisations politiques ? Quoi de plus normal, qu’on ne les entende pas, si la démocratie, c’est un vote tous les 5 ans, un buzz tous les 2 mois, et un sondage d’opinion toutes les semaines ?

La jeunesse veut pourtant en mordre, elle veut en finir avec ce système incapable de répondre à nos besoins, à nos inspirations.

Elle ouvre la porte à la recherche d’une radicalité, d'une transformation profonde de la société. Qui saura la capter ? Car d'autres forces agitent la perspective d'une autre société, basée sur le repli, la haine. Ma génération est marquée par dix ans d'une droite dure, fortement imprégnée de logiques de division. Oui, il existe des jeunes qui se tournent vers l’extrême-droite, qui cherchent une issue dans un entre soi communautaire ou religieux, qui multiplient les pratiques à risque tant l’avenir semble n’être qu’une farce ou une chimère. Demain, c’est loin,t, trop loin. Cette jeunesse fragmentée, elle n’est acquise à personne sauf à sa survie.

Je le dis de manière provocatrice : vers qui veut-on que cette jeunesse se tourne ?, Ccelle qui cherche autre chose dans ce monde où tout qui brûle déjà.

Quel signal est envoyé à notre génération quand les usines ferment leurs portes et avec elles les perspectives de travail et de développement ? Sommes-nous bon qu’à n’être qu’une chair à canon hier en Afghanistan, aujourd’hui au Mali et demain en Syrie ?

Ailleurs, la jeunesse du monde a renversé des despotes de Tunisie et d’Égypte, elle a manifesté pour une éducation gratuite au Québec, en Amérique Latine et en Turquie - comme notre compatriote Sevil qui risque aujourd’hui la prison pour son engagement. Elle appelle à l’union nationale en Palestine. Elle est fer de lance, moteur d'émancipation. Elle porte en elle le partage car ce monde barbare la prive de tout. Surtout, la peur qu’elle inspire, celle qui est instrumentalisée contre elle, elle ne la ressent plus car elle n’a plus rien à perdre. La crise est un moment de destruction mais aussi de construction d’un monde nouveau. C’est bien la jeunesse du monde qui en a les clés.

Notre organisation est une de ces clés, ce déclic dont ont besoin les jeunes aujourd’hui. Comme l’ensemble du mouvement communiste, nous sommes uniques en notre genre, et là est toute l’importance de l’organisation de jeunesse. La JC n’est pas une fille à Papa qui répète docilement la leçon. La JC n’est pas de ces clubs politiques où l’on refait le monde à partir de valeurs abstraites. Nous plaçons notre rôle révolutionnaire dans notre capacité à proposer d’autres choix de société, en étant un outil pour lutter efficacement dans celle-ci. Des milliers de jeunes ont rejoints nos rangs pour combattre ce capitalisme vorace et destructeur. Ils ont superbement ignoré les discours caricaturaux qui nous annoncent morts ou dépassés depuis des années, ils ont passé outre la propagande libérale qui ne cesse de marteler toujours plus de marchandisation de nos vies. Nos pratiques et nos discours ont coïncidé avec leurs vécus.

En 15 ans, le MJCF a reconquis sa présence dans 70 départements. Forts de nos 12 000 adhérents, nous avons agi à partir de l’échelon local : université par université, quartier par quartier, lycée par lycée. En ouvrant nos pratiques d’organisation pour que chaque jeune communiste se sente acteur, producteur et promoteur de nos ambitions. Nous avons démontré notre utilité pour changer la vie des jeunes par la multitude de nos modes d’intervention et de nos combats. Nous avons obtenu en Seine-Maritime le maintien de filières professionnelles, le remboursement à 50% du permis de conduire dans l’Allier, la régularisation de lycéens sans-papiers dans les Yvelines, préservé un parc - seul espace de sociabilité pour les jeunes - à Montauban, obtenu la baisse du prix des transports à Toulouse. Nous organisons la solidarité et le vivre-ensemble avec le sport pour tous dans le Val de Marne, en aidant les Rroms dans la Loire. Dans l'Isère, nous répondons à une agression de jeunes identitaires par un concert unitaire de solidarité pour valoriser la culture populaire. Des étudiants communistes ont mis leurs résidences universitaires en grève de loyers, pour protester contre les pénuries de bourses du CROUS. C’est dans le Var que nous voulons faire construire une maison de la culture et de la jeunesse, dans le Pas-de-Calais que nous exigeons la gratuité des manuels scolaires ou celle des transports dans le Nord

Regardez-nous ! Regardez la salle ! Les JC sont partout ! motivés ! organisés !! nombreux !!! déchaînés !!!

On en trouve à tous les étages : pour coller des affiches, pour faire signer des pétitions, pour vous demander de l’argent et même, et même pour des postes de direction. Combien de secrétaires fédéraux du PCF, de secrétaires de sections dans cette salle que j’ai connu à la JC lorsque j’ai commencé à militer?Je voudrais d’ailleurs les saluer tant ils ont contribué au redressement de notre organisation.

On trouve même des anciens jeunes communistes dans les plus hautes instances de direction nationale jusqu’à un certain Pierre Laurent, ancien secrétaire national de l’UEC qui, paraît-il, a quelques responsabilités au PCF aujourd’hui…

Mais ne tombons pas dans l’auto-satisfaction car il reste des chantiers immenses.

Ce week-end, nous avons eu l’occasion de rappeler notre soutien à Mumia, à Nadir, qui sont ces voix dissonantes, ces voix des sans-voix, ces rares militants d’une parole publique pour ceux qui en sont privés. A commencer par la nôtre. Alors j’évoquerais ici Marwan Barghouti. Emprisonné depuis plus de dix ans maintenant et dont chaque appel depuis sa prison martèle cette exigence d’une irruption populaire salutaire en Palestine. Les Jeunes Communistes seront une caisse de résonance de cet appel en France pour agir ici et maintenant. Nous ne laisserons pas plus longtemps notre pays entretenir des relations privilégiées avec un gouvernement qui colonise, emprisonne et assassine. Nous exigerons des actes clairs pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens. Et le premier d’entre eux, c’est la reconnaissance par la France d’un État de Palestine pleinement souverain sur les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale. C’est la suite logique et immédiate du vote de la France à l’ONU.

Forts de notre bataille pour sécuriser les parcours de vie et le droit au travail de tous les jeunes, nous sommes déterminés àde quitter le fatalisme, pour monter à l’assaut. Monter à l’assaut face à ceux qui veulent nous faire croire que nous ne valons rien, et qu’ils sont encore trop bons de nous embaucher à 20% du SMIC. Monter à l’assaut des places fortes financières qui détruisent le présent et l’avenir des jeunes apprentis jusqu’à l’élève ingénieur lorsque l’industrie est rasée. Monter à l’assaut avec nos parlementaires contre la liquidation masquée du CDI dans le cadre des emplois d’avenir et des accords compétitivité-emploi. Monter à l’assaut face à ces actionnaires et ces patrons-voyous, qui préféreront nous saigner jusqu’au dernier, plutôt que de renoncer à récupérer le moindre sou pour leurs salaires et dividendes indécents. Nous allons recouvrir les murs de ce pays avec les visages de ces voyous du CAC40 : les Carlos Ghosn, les Lashkmi Mittal, les Jean-Paul Agon… J'ai un message pour eux : votre porte-feuille est mis à prix, et les jeunes comptent bien reprendre tout ce que vous leur avez volé ! Nous allons monter à l’assaut face aux grands discours et aux cris d’orfraie sur un prétendu « coût du travail ».

Nous serons au front pour gagner un service public de l'orientation, un statut de l'apprenti, de nouveaux pouvoirs des salariés dans les entreprises et pour les jeunes dans leurs lieux de vie : voilà les droits réels que nous voulons arracher. Monter à l’assaut pour obtenir un statut social avec des services publics forts qui garantisse un avenir serein. En rassemblant au-delà des rangs militants, nous voulons mettre en mouvement la jeunesse pour gagner cet autre monde dont je vous ai parlé tout à l’heure.

Cet assaut de la jeunesse ne réussira pas sans vous. Ces batailles que je viens d’énoncer, nous savons qu’elles durent depuis des dizaines d’années déjà.

Nous l’avons dis, des milliers de jeunes nous ont rejoint pour bouger, d’autres sont à aller chercher pour transformer ce monde fini. Je viens devant vous affirmer avec force que la jeunesse exploitée, celle qui vient des quartiers populaires, celle qui vit dans la précarité, cette jeunesse est bien décidée à se battre. Elle vient vous dire que si le désespoir est présent, la rage est plus forte.

Les Jeunes Communistes, le Parti Communiste Français et le Front de gauche ont un rôle majeur à jouer en mettant leurs forces en commun pour créer les conditions d’un grand mouvement intergénérationnel qui, comme lors des luttes contre le CPE et les retraites, se donne pour ambition de stopper le rouleau-compresseur du libéralisme. L’alternative à l’austérité, c’est une question de survie. C’est vital pour les jeunes de Grèce, d’Espagne, du Portugal et d’Italie. C’est vital pour les jeunes de France.

Camarades, la tâche est immense mais elle est excitante. Ensemble, nous faisons d’ores et déjà de grandes choses. Ensemble, avec de la confiance, de l’écoute, des moyens aussi…, nous pouvons faire de très très grandes choses : écrire en rouge et en grand les nouvelles pages du communisme dont notre siècle a tant besoin !

Je voudrais finir ce discours, en vous remerciant de votre gentille attention dont j’espère ne pas avoir abusé, avec un clin d’œil à Paul Vaillant-Couturier. Il disait : « Le communisme est la jeunesse du monde. » J’ai envie de dire qu’il nous revient à nous, à nous tous de faire en sorte que la jeunesse soit le communisme du monde…

Comptez sur nous. On compte sur vous ! Bon congrès au Parti communiste français !

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